" Longtemps on a n glig le Contr'un de La Bo tie. On le redoutait, ou on le d daignait, car ce n'est qu'une brochure, mais si nourrie et si pleine qu'elle vaut un livre. Il appartenait nos temps de seconde renaissance et d'investigations moins isol es, de revenir ces grands penseurs du XVIe si cle et d'en pr senter les crits la jeunesse des coles, de mieux voir ainsi les volutions de l'esprit fran ais travers les si cles, et de chercher dans le pass le premier cri, si je puis dire, des institutions modernes. On ne pouvait omettre, dans ce tableau, le c l bre p rigourdin La Bo tie, qui aura un jour sa statue dans Sarlat, sa ville natale. Je donne sur lui une tude politique compl te. On ne peut faire que de la politique avec La Bo tie; mais je n'oublie pas le style du Contr'un. Les belles pens es ne sont rien sans la forme. Je n'oublie pas le grand m rite litt raire de ce chef-d'oeuvre de la prose fran aise il y a trois cents ans, ni les efforts universels d s cette poque pour le perfectionnement de notre langue: chacun apportait sa pierre l' difice; chacun avait son syst me et son id e. J'ai aussi examin de pr s l' ge de La Bo tie dans le Contr'un. Notre savant et ing nieux philologue M. Dezeimeris, membre correspondant de l'Institut, en avait dit un mot, bien avant moi, et, je l'avoue, mon insu. J'ai d velopp ses pr visions toujours s res, en m'appuyant des allusions, des noms propres, des citations du Contr'un, et faisant servir La Bo tie ma chronologie et mon oeuvre. C'est un petit point, mais je l'ai mis, je crois, hors de doute. La Bo tie me menait droit Montaigne. Il tait curieux de voir comment deux amis pouvaient penser diff remment en s'aimant si troitement. Dans les r volutions, la conformit d'id es fait souvent l'amiti et la rend plus durable. J'ai suivi jusqu'au bout cette situation psychologique, et j'ai trouv que sous des formes d' tat diverses et avec un caract re oppos , nos deux chercheurs, l'un aust re, l'autre plus doux, se donnaient la main pour une m me chose, une sage et honn te libert ..."