Pendant que Stendhal crivait en France des romans sur la transgression, Jane Austen crivait sur la raison plut t que sur le sentiment, sur la mod ration et l'adaptation plut t que sur la transgression. Jane Austin est, parmi les crivains anglais, celle qui a su d crire les liens troits entre amour, s duction et mariage dans l'Angleterre du XIX si cle. Six romans ont suffi pour faire de Jane Austen (1775-1817), l'un des plus grands crivains britanniques. Vive ironie, sens de l'humour, et un talent pour d crire toute une poque; comme dit Virginia Woolf, l'un des auteurs les plus satiriques de son temps. La famille, les rencontres, les bals, l'amour romantique, tous les chemins de Jane Austen m nent au mariage et la fid lit . La soci t chez elle est moins responsable de l'individu. Le devoir ne tol re pas l'interpr tation, c'est une id e absolue. Elle d fend le bonheur de faire son devoir, d' tre fid le ses principes. Dans le monde de Jane Austen, tout est temp r . Pas de monstres comme chez Balzac, Dosto evski, mais de petits monstres sentimentaux comme Wickham dans un orgueil et pr jug . Cet officier est plut t m prisable que monstrueux; il n'a tu personne, il a trahi, il s'est mal comport dans une relation amoureuse. Dans les romans de Jane Austen, vous ne trouverez pas d'actions spectaculaires, ni guerre, ni paix, ni politique ni religion. Vous allez vivre dans une classe sociale la gentry, noblesse de campagne, qui passe son temps faire des pique-niques, des bals, des comm rages. C'est un huis clos qui permet d' clairer des comportements, et des r actions. Le social n'existe pas, la religion n'existe pas, la r bellion n'existe pas. Si vous aimez les romans d'Agatha Christie, vous pouvez appr cier cet huis clos de Jane Austen, o des personnes, sans h ro sme dans le sens collectif du terme, peuvent se montrer des h ros au sens individuel, dans le sens de destin de vie . Il est possible qu'Agatha Christie ait t influenc e par Jane Austen; Cette derni re poss dait un certain talent pour manier l'ironie, suscitant le rire du lecteur sur les pr tentions m diocres de certains personnages comme M. Collins, ou sur le bavardage interminable de Mme Bennet. Cette ironie dans le travail romanesque de Jane Austen est un h ritage de la litt rature classique, o la mod ration tait consid r e comme une vertu. Ironiser pour ne pas hurler, sourire pour ne pas crier, garder un ton poli pour ne pas blesser. Cette ironie va manquer progressivement dans la litt rature europ enne.