Deux heures de l'apr s-midi sonnaient toutes les glises de Rome; au m me instant, la cloche du Capitole donna le signal de la f te; on tait au mardi pr c dant le Mardi-Gras de l'ann e 1708. ce moment-l , un homme de quarante-quatre ans environ, petit, maigre, le visage triste et empreint de cette m lancolie pensive que t moigne une p leur studieuse, entrait dans la rue du Corso; mais, au premier pas qu'il fit dans cette rue, il s'arr ta tourdi, bloui, incapable d'avancer. Cette grande rue du Corso, si large, si droite, qu'on peut, du palais de Venise qui la commence, apercevoir la place du Peuple qui la termine, se trouva tout d'un coup, et comme par enchantement, remplie d'une foule immense de masques de toutes les grandeurs, de tous les ges, de toutes les bigarrures; il y en avait en carrosse, il y en avait pied, il y en avait cheval; il en d bouchait de toutes les rues adjacentes, il en surgissait toutes les crois es des maisons; on en voyait poindre jusque sur les toits, puis des balcons qui ornent toutes les fa ades; on voyait descendre des tapis de toutes les couleurs qui, s'agrafant au balcon m me et se trouvant ainsi suspendus, faisaient que maisons et habitants s'unissaient comme pour faire ensemble une longue mascarade.